Blackrock - Le mastodonte greenwasher

Vous connaissez sûrement ce nom... Blackrock, c’est la première multinationale de gestion d’actif au monde. Renforcée comme beaucoup de multinationales par la crise du Covid, le mastodonte pèse aujourd’hui près de 10 000 milliards de dollars d’actifs à travers le monde. Une situation inédite dans l’Histoire, qui donne à l’entreprise une position d’influence énorme... et celle-ci en profite largement !

Au total, Blackrock détient pas moins de 87 milliards de dollars de parts dans des entreprises d’énergies fossiles, comme Chevron ou Total dans lesquelles elle possède minimum 5% du capital. Elle investit également énormément dans les banques qui financent les activités fossiles, comme JP Morgan, la BNP Paribas ou la Société Générale, ou dans les GAFAM (où elle possède entre 2 et 3% du capital).

En France, Blackrock est le premier actionnaire, après l’actionnariat salarié, de Total, et premier bénéficiaire des dividendes du CAC40. En 2021, elle a ainsi touché 1,7 milliards d’euros de la part des grands groupes français. Elle a donc très peu intérêt à ce que des entreprises comme Total accélèrent leur transition...

Pour verdir son image, l’entreprise affiche publiquement ses engagements climat à travers l’adoption pour tous ses investissements de critères ESG : environnementaux, sociaux et de gouvernance. Problème : ces critères sont non-contraignants et reposent sur une démarche uniquement volontariste... L’outil parfait de greenwashing !

Au total, seul 7% des investissements de l’entreprise sont liés à des critères environnementaux ou sociaux chiffrés. 7%...

Et selon Le Guardian, entre 2015 et 2019, l’entreprise s’est opposé ou abstenu à 82% des résolutions concernant le climat dans les entreprises où il possède des actions...

 

Il y a quelques semaines, à la COP26 de Glasgow, l’entreprise s’est payé un nouveau coup de pub sur son engagement climatique : Larry Fink, son PDG, a annoncé rejoindre la Glasgow Financial Alliance for Net Zero, rassemblant des acteurs financiers s’engageant tous à réduire leurs émissions nettes de gaz à effet de serre de leurs portefeuilles d’investissement à zéro d’ici l’année 2050.

Une belle Alliance en apparence, mais surtout une vraie machine à greenwashing dans la réalité : l’Alliance n’exige aucune sortie des énergies fossiles, pourtant absolument nécessaire pour tenir les objectifs climatiques de l’Accord de Paris, et n’impose aucune baisse des émissions en valeur absolue, laissant la possibilité pour les entreprises de tout miser sur la compensation carbone plutôt que sur la transition réelle de leurs activités...

Là où le double jeu de Blackrock est sûrement le plus visible, le plus cynique même, c’est au niveau européen.

Comme l’a très bien montré l’ONG Reclaim Finance, l’entreprise y exerce un lobbying agressif pour empêcher toute régulation contraignante de la finance. Cette année, elle s’est particulièrement impliquée pour empêcher la taxonomie des activités polluantes, en dépensant, avec 23 associations professionnelles, 30 millions d’euros de lobbying auprès des institutions européennes : participation active à plusieurs groupes de pression, liens étroits entretenus avec les fonctionnaires européens (organisations de réunions, embauche d’anciens employés de la Commission), participation à des groupes d’expert qui conseille l’UE sur les questions finance et climat (oui, vous avez bien lu !)...

Le lobbying de Blackrock a atteint son paroxysme en 2020 quand la Commission européenne a choisi l’entreprise pour la conseiller sur la manière dont l’UE pourrait intégrer les critères environnementaux et climatiques dans sa supervision bancaire.

 

Nous ne pouvons laisser les intérêts des géants financiers comme Blackrock dicter les politiques climatiques européennes. Cela semble tout simplement du sens commun... Pourtant, c’est un combat que nous devons mener, et que nous menons au Parlement européen.

Ensemble, nous pouvons faire bouger les lignes.

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