La Commission européenne appelle à mettre fin à l’exploration de gaz et de pétrole dans l’Arctique mais y encourage l'exploitation minière

13 ans après sa première « politique Arctique », la Commission européenne en publie ce mercredi 13 octobre 2021 une nouvelle version, qui appelle à cesser toute activité d’exploration des réserves d'énergies fossiles dans l’Arctique.

Une première victoire pour celles et ceux qui défendent le climat, la biodiversité et la justice sociale ; encore insuffisante puisque pour l'Arctique comme pour le climat, c'est à l'exploitation et pas seulement à l'exploration qu'il faudrait mettre fin. Comme l’a récemment pointé l’ONG Reclaim Finance, l’exploitation des réserves en gaz et en pétrole déjà découvertes en Arctique pourrait consommer 22% du budget carbone qu’il nous reste pour limiter le réchauffement climatique à moins d’1,5°C. Décider de ne pas exploiter ces ressources serait la seule décision à la hauteur de l'urgence.

La proposition de la Commission européenne est d'abord et avant tout diplomatique : elle vise à mobiliser les États engagés en Arctique, d'abord et avant tout les États membres, à mettre en place des moratoires sur les énergies fossiles. La route est longue, puisque la moitié des entreprises opérant aujourd’hui en Arctique sont européennes, à commencer par la française TotalEnergies, dont les velléités d’expansion s’élèvent à +28% de capacité de production d’ici 2030, par rapport à sa production de 2020. La proposition faite de refuser l'achat de charbon, pétrole ou gaz qui seraient issus des nouvelles réserves est toutefois signe d'une détermination bienvenue.

La motivation de la Commission européenne est en réalité de mettre un terme à sa dépendance au pétrole et au gaz de l’Arctique, qui représentent aujourd'hui encore une source d’approvisionnement majeur pour le continent : 1/5e du gaz consommé dans l’UE provient de l’Arctique. Le contexte de hausse dramatique des prix du gaz nous rappelle à quel point il faut urgemment changer de braquet, et aller beaucoup plus loin et plus vite dans la sortie des énergies fossiles.

Si la proposition de la Commission est un premier pas vers la sortie du tout-fossile, elle et les États membres doivent donc aller plus loin. A l’instar du Danemark, qui s’est engagé à sortir complètement de l’exploitation de pétrole et de gaz en mer, tous les États de l’Union doivent mettre un terme à leur soutien et leur financement de ces activités destructrices. Il faut que l’UE suive le chemin tracé par le Danemark et le Costa Rica et rejoigne la coalition “Beyond Oil and Gas”.

La France a un rôle particulier à jouer, puisque tout en s'étant engagée à cesser exploration et exploitation des fossiles sur son territoire terrestre et maritime, elle rechigne à cesser de soutenir les firmes françaises, dont évidemment Total, qui déploient ce type d'activités hors du pays. Comme si climat et biodiversité se jouaient des frontières.

Au-delà de cette annonce, l’UE doit être cohérente plus globalement sur toute sa politique énergétique, et ne plus laisser aucune place aux énergies fossiles : charbon, gaz, pétrole, mais aussi hydrogène non-issu de renouvelables, ne doivent plus recevoir un seul euro d’argent public. La réponse à la crise énergétique que nous traversons ne peut passer que par la sobriété énergétique et le développement massif d’énergies renouvelables. 

Enfin, la stratégie de la Commission pour l'Arctique encourage l’exploitation des ressources en minerais de cette zone fragile : comment peut-on justifier de sortir de l’extraction du pétrole pour aussitôt y développer l’extraction minière ? C’est une aberration environnementale, tant ce type d’activité ne peut être mené autrement qu’en détruisant les fonds et les habitats marins, mettant ainsi en danger la biodiversité si fragile de l’Arctique. La stratégie proposée par la Commission fait ainsi écho aux annonces du Président Macron et à son plan France 2030 : la Commission n'est toujours pas sortie de la logique croissantiste du extraire-consommer-jeter. Il est temps de reconnaître, par exemple dans l'accord mondial pour la biodiversité en cours de négociation, que la nature a des droits qui doivent être respectés.

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